Les Chambres
Louis Aragon
Price: £9.99
First published in 1969, Les Chambres was Aragon’s last collection. Subtitled poème du temps qui ne passe pas, it is a beautiful and melancholy meditation on time, age and love, a last gift to his wife Elsa Triolet who died the following year: ‘C’est le dernier cadeau que j’ai fait à Elsa, histoire d’avouer que tout entre nous n’a pas été si ensoleillé qu’on se plaisait, qu’on se plaît à le croire, qu’il y a eu entre nous des journées comme celle-là par exemple où je t’avais perdue, dont il est question dans Les Chambres. Cette phrase tourne sur elle-même. Ainsi la vie et la mémoire.’
Front cover: Boris Taslitzky, Louis Aragon et Elsa Triolet, 1955, oil on canvas, copyright the Taslitzky estate, reproduced by permission of Évelyne Taslitzky
Le meurtrier se souvient comme le feu des feuilles Comme le vent des portes Le meurtrier se souvient du bras et de l’oeil Du geste et de la force Ah ce jour d’arbre humilié jusqu’au front L’âme qu’on tire de l’écorce Le grand pouvoir d’anéantir Ce fût brisé Le meurtrier se souvient de ci qui fut pour lui seul Puisque l’autre est mort ou que l’autre est morte Il n’y a pas de vin plus soul que le secret Il n’y a pas plus grand’merveille qu’á savoir sans partage Et celui-là qui fait mourir sa vie après Sa vielle sans remords en pleine conscience Je t’envie assassin mon frère par le sang Pour tout ce temps muet à revivre ton crime Pour ce refuge en toi d’ecarlate et de cris Etouffés Pour ce théâtre palpitant en quoi toute maison se transforme si tu T’y enfermes Je t’envie assassin pour ton tumulte sourd Parce que plus jamais ainsi ne m’écherra faire l’amour De celle que j’ai tout le long de mon vivre aimée à la semblance du meurtre Parce que cette chose de nous vivants cette chose De nous deux ce ciel démentiel Qui n’a de mots pour être et qu’il est vain Désirer à l’envers parcourir comme une route Cette chose de nous toujours nouvelle quand elle vint Sur nous s’abattre n’était que de moi seul sans doute Meurtrier meurtrier que je t’envie Toi qui vis clos dans ta mémoire Mais moi rien Mon amour j’ai beau de chambre en chambre en poursuivre les pas J’ai beau voyager de halte en halte chercher L’endroit du sanglot la grange où le lit Mon amour j’ai beau le traquer ou son ombre fuit J’ai beau tenter d’en ouvrir les serrures à chiffre J’ai beau frapper de mon poing nos battants verrouillés J’ai beau l’appeler mon amour beau vers lui crier Je me perde parmi nous je me perds parmi nos Cages quelques jours louées S’il fume encore un feut peut-être où nous fûmes Le temps aveugle en confond les parfums Les amants on pas de fumées Ils s’éloignent l’un l’autre comme font Les convives obscurs qui heurtent les plafonds De leurs têtes fantômes Au-dessus d’un repas porte jusqu’à leurs lèvres Regarde l’ombre sur le mur est-ce bien moi Mon âme est-ce Bien toi semblance de nous-mêmes Toutes les stations n’auront jamais été qu’auberges La vie ainsi qu’un lit ouvert On l’abandonne Et dans les draps défaits où ne dort plus personne Personne n’entendra nos cris d’alors éteints Personne ne lira nos corps d’entre eux détreints Sur les rides du linge écrits comme un sommeil secret d’écrevisses Ô Chine noire des ruisseaux où tremble Où tremble le chiffon rouge d’un baiser Piégé
The murderer remembers as the fire, the leaves The wind, the doors The murderer remembers the arm and the eye The movement and the force Ah! this day of the tree split right to the crown The heart ripped out of the bark The great power of destruction this might be shattered The murderer remembers what was for him alone Since the other is dead or the other woman is dead There’s no wine more intoxicating than the secret There’s no greater wonder than knowing without sharing And he who kills his life after His vigil without remorse in full consciousness I envy you, assassin, my blood brother For all this dumb time to relive your crime For your inner refuge of confusion and of cries Stifled For this throbbing theatre into which every house is turned if you Shut yourself up in it. Assassin I envy you for your muffled tumult Because in that way never again will it fall to me to gain the love Of the one I have loved all my life in the likeness of murder Because this love of us living this love Of us two this utterly mad sky Which has no words for being and it is vain To want to go over on the wrong side like a road This love of ours always new when it came To land on us was doubtless only mine Murderer murderer how I envy you You who live enclosed in your memory But me not at all My love in vain I follow its footsteps from room to room In vain I travel from stop to stop to seek The place of the sob the barn or the bed My love in vain I track it where its shadow flees In vain I try to open its combination locks In vain I pommel our latched shutters In vain I call her my beautiful love cry out to her I lose myself in us I lose myself on our Stairways rented for several days If a fire still smokes perhaps where we were Blind time mingles its scents Lovers have no smoke They leave each other as do The strange guests which bump the ceilings With their ghostly heads Over a meal brought up to their lips Look at the shadow on the wall is it really me My heart is it Really you resemblance of ourselves All the stops will never have been more than inns Life like a turned down bed We leave And in the ravelled sheets where no one sleeps any longer No one will hear our faint cries of former times No one will read our pallid bodies between them On the wrinkles of the linen written like a secret sleep of crayfish O Indian ink of the streams where quivers Where quivers the red chiffon of a kiss Trapped
‘a poem of extraordinary beauty and marvellously evocative musicality., One o he very best poetic works of twentieth century Europe.’
Mistress Quickly’s Bed
‘an extravagant lament for lost time.’
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